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Pratique du Yoga

Pourquoi la pratique collective du yoga est bénéfique contre la solitude ?

5,5 millions ! C’est le nombre de français qui souffrent de solitude selon une étude menée par l’institut BVA. Alors que cette dernière est de plus en plus pointée du doigt pour ses méfaits sur notre santé, le yoga devient le messager d’une culture du collectif.

Comment la pratique du yoga est-elle une voie d’ouverture au monde et aux autres ? Peut-on guérir le sentiment de solitude par cette pratique ?

La solitude subie n’est pas bonne pour notre cerveau

Une équipe de recherche américaine, dirigée par le neuroscientifique Vibol Heng et ses collègues de l’Université Thomas Jefferson de Philadelphie, est parvenue à démontrer que le fonctionnement du cerveau était modifié par l’isolement. Les souris isolées pendant presque un mois lors de l’expérience, présentaient des comportements différents, imputables selon l’équipe, à la réduction d’une protéine nommée BDNF, indispensable dans la croissance neuronale.

Il a été observé que ces souris répondaient moins aux stimuli du plaisir que leurs semblables évoluant en communauté. Elles ne montraient que peu d’intérêt pour les activités auxquelles elles s’adonnent en temps ordinaire.

Ce qui soulève la question du trouble dépressif. En effet, la solitude serait un des facteurs principaux du développement de cet état psychologique. Elle entrainerait également une altération de la mémoire, un déficit cognitif et des troubles de la concentration.

“Plusieurs études ont ainsi montré que la solitude subie, chronique, durable, contribuait à créer un terreau favorable à l’expression d’une certaine mélancolie, propice à la dépression, mais également au développement de maladies neuro-dégénératives, comme la maladie d’Alzheimer par exemple”, rapporte Arnaud Campéon, enseignant-chercheur en sociologie[1]. Il ajoute : “La solitude est aussi l’expression d’un sentiment d’étrangeté au monde, au cœur d’une société individualiste et individualisante. Or le fait de ne pas se sentir appartenir à ce monde, de ne pas s’y reconnaître ou de s’y sentir exclus, génère des situations de stress, d’anxiété, d’abandon, de dépréciation qui sont autant de déterminants défavorables à la santé”.

C’est notre état général qui est affecté par la solitude

Elle est “plus mauvaise pour la santé que quinze cigarettes par jour” selon Mark Robinson, directeur général de Age UK.

En effet, des chercheurs de l’université de l’Ohio ont démontré dans leur étude sur la solitude, qu’elle affectait le système immunitaire. Soumis à des états de stress similaires, les patients qui se disent entourés et soutenus, développaient moins de marqueurs d’inflammation que ceux qui disent connaitre des états de solitude récurrents. Avec l’augmentation de ces marqueurs, c’est le système cardio-vasculaire qui peut être atteint, ainsi que la digestion on ou encore une mauvaise régulation de la tension artérielle.

Par ailleurs, les patients ayant vécu un grave accident, tels qu’une crise cardiaque ou un AVC, récupèrent bien mieux et plus vite lorsqu’ils sont entourés et soutenus par leurs proches, que les patients en situation de solitude.

Si la solitude choisie amène parfois un soulagement (retraites, ascétisme etc), lorsqu’elle est la conséquence d’une situation d’isolement, elle doit être prise au sérieux. Et peu importe les raisons (agoraphobie, anxiété inavouée d’aller à la rencontre de nouvelles personnes, problèmes financiers, épuisement, mamans d’un nouveau-né, difficulté à trouver sa place), il faut garder en tête que l’isolement est contraire à la nature humaine.

L’humain est programmé pour évoluer en communauté

N’en déplaise aux solitaires, l’humain est une espèce sociale doté d’un fort instinct grégaire ! Son écosystème naturel se compose, entre autres, d’une tribu de semblables. Le déni de ce désir naturel de lien aux autres conduit à la déprime et nuit à la santé. Des phénomènes que l’on observe chez toutes les espèces qui vivent en collectivités, comme les éléphants ou les loups.

C’est dans l’échange et le contact que l’humain s’épanouit. La créativité, la joie, l’amour et l’ensemble des qualités constructives que peut connaitre un humain durant sa vie, sont alors diminuées et avec elles, le potentiel d’existence qui y est corrélé.

D’ailleurs, ne dit-on pas qu’ensemble, on va plus loin ? Ou que l’union fait la force ?

Mais alors pourquoi se tourner vers le yoga ?

Le yoga n’est pas une recette miracle ! Il ne peut pallier à lui seul aux problèmes structurels de notre société qui crée les conditions de l’isolement. Cependant, cette pratique est riche de rencontres de qualités et contribue à guérir la solitude.

Tout d’abord sur un plan purement physiologique, la solitude accroît considérablement le taux de cortisol dans le corps (hormone du stress). Or, la pratique du yoga en groupe stimule les centres de la joie et du contentement, à l’origine de la sécrétion de sérotonine, de dopamine et même d’ocytocine.

Saviez-vous que ces neurotransmetteurs et hormones sont fondamentaux pour notre équilibre psychologique et pour le fonctionnement général de l’organisme ? Précurseurs de la joie, de la motivation et de notre bonne capacité à créer du lien avec les autres, leur stimulation nous fait entrer dans un cercle vertueux.

En effet, les asanas sont des facilitateurs de bien-être. Ces postures permettent à l’énergie de circuler, et avec elle, nos fonctions endocriniennes et métaboliques s’en portent mieux. Une grande partie de notre santé repose sur ces deux piliers. Plus ils sont solides et équilibrés, plus il nous sera facile d’entretenir une vie harmonieuse, riche de relations et de joie.

Mais à cela s’ajoute l’émulation d’une pratique en groupe, la création d’un échange subtil, d’une atmosphère de soutien et de partage.

Le yoga est un espace de rencontre de soi et des autres

Il ne s’agit pas seulement de croiser quelques amis en soirée ou de combler notre solitude par des rencontres fugaces, mais bien de vivre une démarche intérieure en résonance avec les autres. On ne le rappellera jamais assez, yoga signifie « union ». L’union en soi, entre le corps, l’esprit et l’âme…Mais aussi l’union avec le monde qui nous entoure.

Peut-on vraiment éprouver – au sens de mettre à l’épreuve – son sentiment d’union lorsque l’on est seul dans son salon ? Ou n’est-ce pas dans la rencontre avec ce qui nous irrite, avec ce qui nous bouscule et nous touche, que l’on est alors en capacité de comprendre que nous sommes dans l’état d’union !

Et bien que le yoga ne soit pas une religion, il rassemble autour d’une philosophie commune. Il permet à chacun d’ancrer sa quête individuelle dans l’énergie d’un groupe. Dans l’absolu, le yoga vise la transcendance de la dualité, il n’y a alors plus « moi » et « les autres », mais l’absorption de toutes les individualités dans l’unité absolue.

Ainsi, on peut dire que le yoga est inclusif, il est une invitation permanente à sentir le monde entier en soi…Et avec cela, la solitude s’évanouie.

Alors, comment peut-on recréer du lien au monde et aux autres avec le yoga ?

  • S’inscrire à un cours de yoga en présentiel plutôt qu’à un cours en ligne. Même si cela vous contraint à un long trajet, les bienfaits de la rencontre valent la peine de se déplacer.
  • Fréquenter les mêmes horaires de cours pour se donner la chance de créer des liens avec les autres pratiquants.
  • S’installer sur son tapis le cœur ouvert, en laissant de côté les tribulations du quotidien pour apprécier toute la présence des autres durant le cours.
  • Participer à des satsangs: des rassemblements autour de la transmission de la philosophie du yoga. Ces échanges sont riches de sens et très nourrissant pour l’esprit.
  • Participer à des sessions de chants de mantra. De plus en plus d’écoles proposent régulièrement de se retrouver ensemble pour chanter des mantras. Ces moments sont précieux et amènent une grande joie.
  • S’ouvrir au karma yoga, la pratique d’actions désintéressées. Elles peuvent être pratiquées au sein de centres de yoga ou dans la vie de tous les jours. En ce sens, les enseignements bouddhistes rejoignent la philosophie du yoga : lorsque l’on tend la main aux autres, que l’on offre son aide et sa présence, aucune solitude ne peut nous envahir. Il n’y a de place que pour la joie.
  • Approfondir la voie du bahkti yoga. Elle vient de la racine Bahj, qui signifie adorer, servir, aimer, être dévoué. Il s’agit de cultiver au quotidien la voie du cœur. Comprise dans son sens hindouiste, il s’agit essentiellement de la foi dans le divin. Mais, dans le sens yogique, c’est la concentration de l’attention dans le chakra du cœur, Anahata Chakra. Elle amène le pratiquant à développer l’amour pour soi et pour le monde tel qu’il est.
  • Participer à des retraites de yoga, un moment privilégié pour se sentir entouré et stimuler en nous, nos capacités innées à tisser du lien.

Finalement, le yoga recrée un écosystème véritablement adapté à l’humain : une grande communauté de semblables qui célèbrent leur joie ensemble. Car il s’agit bien d’une célébration de la vie ! Une célébration de cette force qui nous relie tous !

Namaste !

En aucun cas la pratique du yoga ne peut se substituer à un traitement médicamenteux et/ou un suivi par un spécialiste, sans avis médical préalable.

[1] Propos retranscris par Guillaume Narduzzi-Londinsky, pour les Inrockuptibles

Avec la précieuse contribution de Sahra Leclerc

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