Comme le yoga, l’agro-écologie soutient une vision holistique du monde, où l’homme et le vivant évoluent de concert. Notre connexion à la terre, comme à notre propre corps, devient alors gage de transformations intérieures et extérieures.
Si 2020 restera l’année liée à la crise sanitaire de la Covid-19, elle est aussi l’année où le poids de ce que l’homme fabrique a dépassé celui de l’ensemble du vivant sur terre. Selon un article publié dans la revue Nature, la masse de l’artificiel égale désormais celle du vivant : un tournant qui montre le poids – au sens propre et au figuré – de l’humanité sur la planète. La même étude assure que cette masse aura triplée d’ici 20 ans si nous ne changeons pas nos habitudes de consommation et plus généralement nos modèles de vie. Cela vient nous rappeler que la crise sanitaire que nous traversons s’emboîte dans une catastrophe environnementale bien plus large et que notre rapport à la terre met en péril l’humanité.
Afin d’endiguer la pandémie actuelle et celles à venir sur lesquelles les scientifiques ne cessent de nous alerter, il nous faut réparer notre relation avec l’ensemble du vivant afin de sortir de vieux schéma aberrants d’exploitation de nos ressources. C’est ce que propose l’agro-écologie – une méthode d’agriculture au carrefour de l’agro-économie et de l’écologie – qui conçoit des systèmes de production en s’appuyant sur l’intelligence des écosystèmes, tout en veillant à diminuer notre effet sur l’environnement. Des techniques agricoles économes et accessibles à tous qui se basent sur une observation fine de la nature et une vision holistique du monde qui n’est pas sans rappeler la philosophie du yoga.
L’union de l’Homme et de la terre
Si l’on a coutume de dire que l’étymologie du mot yoga renvoie à l’union (du corps et de l’esprit, de l’homme à l’univers, du microcosme au macrocosme), l’agro-écologie offre une mise en pratique très concrète de ce principe. Présidente de l’association Terre & Humanisme fondée en 1994 pour transmettre une agriculture écologique, humaine et solidaire, Françoise Vernet rappelle que l’« agro-écologie n’est pas seulement une méthode pour nourrir les hommes mais aussi une philosophie de vie au coeur de laquelle l’homme vit en cohérence avec le biotope ». Dans son jardin pédagogique et expérimental du mas de Beaulieu en Ardèche, l’association propose de mars à octobre des stages courts ainsi que des formations longues d’agriculteurs en agro-écologie à un large public souhaitant aussi bien développer ses connaissances sur le plan personnel que monter un projet professionnel. Des séjours qui permettent de transmettre des techniques afin de vivre en cohérence avec le vivant et en respectant la terre (sols, flore, faune).
Egalement pratiquante de yoga depuis 30 ans, Françoise Vernet reconnait le parallèle avec le yoga en terme d’écoute, de respect et de sobriété : « en agronomie, on respecte son biotope, en yoga son corps. Par moments, il y a des choses que l’on ne peut pas faire, alors on fait avec ce qui existe ». Comme un muscle qui ne peut être surmené indéfiniment sans occasionner de claquage, nous voyons aujourd’hui les dégâts parfois irréversibles causés par notre manque d’écoute, d’humilité et soif de rentabilité sur les sols devenus stériles et pollués. L’agroéconomie prône ainsi une démarche et le développement de techniques circulaires et intelligentes où l’homme s’adapte à la nature et aux réalités climatiques. « Pour faire face aux problèmes de sécheresse que nous rencontrons en Ardèche, nous n’allons pas chercher à pomper de l’eau sur le réseau mais réfléchir à des alternatives sur comment apporter de l’ombrage, mettre en place des associations de plantes entre elles. Plus généralement, nous réfléchissons à la gestion des déchets des animaux, à troquer le surplus, ou à faire des stocks pour l’hiver par exemple ».
La suite de cet article est à découvrir dans Esprit Yoga n°61, disponible dans notre boutique en ligne.
Avec la précieuse contribution de Jeanne Pouget