L’un cultive la paix, les autres étudient l’art de la guerre. Pourtant, du shala au dojo, il n’y a qu’un pas, qui ouvre la voie à de nouvelles pratiques puissantes.
Yama, le premier des huit membres du yoga, comporte cinq observances morales. En tête, ahimsa, la non-violence : ne pas tuer ou nuire en pensée, en parole ou en acte. La bienveillance fonde le socle éthique et l’essence même du yoga. Un altruisme a priori bien éloigné des arts martiaux. Rivalité, coups, fureur, cascades spectaculaires… les films de kung-fu ont laissé dans l’imaginaire collectif une image plutôt agressive de ces techniques de combat. Pourtant, le yoga et les arts martiaux sont apparus au même endroit, il y a plusieurs millénaires.
Comme le yin et le yang
En Inde, on a retrouvé les plus anciennes traces d’un système d’auto-défense dans le Rig-Veda : le kalarippayat, toujours enseigné au Kerala. On raconte que Boddhidarma, un moine bouddhiste du sud de l’Inde, l’aurait inventé avant de partir fonder l’école du Zen au Japon et le courant Shaolin en Chine. Dans leur berceau asiatique, où les enseignements du Bouddha invitent à l’éveil par la conduite d’un comportement exemplaire, les pratiques yogique et martiale font partie du chemin spirituel. Le suffixe « do » accolé à de nombreuses disciplines, comme le judo, l’aïkido ou le taekwondo, signifie d’ailleurs « la voie ». Aux origines, l’art sacré du combat est réservé aux moines. Il en va de même pour les brahmanes, hommes de foi, caste la plus haute de la société indienne… et premiers yogis de l’histoire.
Deux faces d’une même médaille, le sage yoga et les arts guerriers partagent le sens de l’ascèse pour accéder au divin. Pratiquées de nos jours, ces spiritualités en action entretiennent la santé du corps et l’agilité de l’esprit, développent la confiance en soi et l’attention, ici et maintenant. Dans la rigueur de leurs techniques, leurs codes et leurs rituels, elles mènent également à une forme d’oubli de soi, précieux pour qui aspire à la dissolution de l’égo.
Ta routine tu accompliras
En tant que pratiquant de yoga, nous savons combien chaque séance constitue une véritable expérience intérieure, où le corps et le mental se relient progressivement dans la conscience d’un soi non séparé du monde. Nous savons aussi ce que ce ressenti exige d’attention et de patience. On appelle sadhana la routine personnelle, la répétition persévérante de la pratique, quelle que soit l’humeur ou l’état de fatigue. Les arts martiaux antiques, eux, parlent de shugyo pour désigner l’effort soutenu, l’entraînement intense destiné à unifier le corps, l’esprit et l’âme.
La suite de cet article est à retrouver dans le numéro d’Esprit Yoga actuellement en kiosque ou accessible ici.
Par Lucile de la Reberdière