En France, la méditation a fait une entrée aussi discrète que prometteuse dans le milieu médical et du soin. Une intronisation que l’on doit aux travaux pionniers du médecin Jon Kabat-Zinn.
Dans les années 1970, John Kabat-Zinn est élève notamment du maître bouddhiste Thich Nhat Hanh, (fondateur du village des Pruniers en Dordogne). Médecin, il a en charge des patients atteints de psoriasis, de cancers et qui souffrent de douleurs chroniques. Il cherche alors à diminuer leurs souffrances.
Méditer pour soigner la dépression
Depuis, les résultats de ses recherches ont traversé l’Atlantique. C’est en 2003, à Paris, à l’hôpital Saint-Anne, que sous l’impulsion du psychiatre Christophe André, des groupes de pratique de méditation de pleine conscience sont proposés aux personnes diagnostiquées dépressives, à l’aide d’un protocole adapté (voir encadré). L’intégration à un groupe se fait après une rigoureuse sélection. L’engagement et la motivation sont en effet des facteurs déterminants dans le processus de rémission. Florent Dulong est infirmier clinicien, formé par Christophe André. C’est lui qui mène ces groupes de pratique, il explique ainsi que « chaque méditant doit s’entraîner tous les jours de la semaine pendant au moins une heure ».
La dépression, qui doit être diagnostiquée par un spécialiste, se caractérise par la perte de l’élan vital et du plaisir, par des idées noires, de l’insomnie, des problèmes d’estime de soi, d’isolement. « Tout le monde rumine, on a tous des pensées sombres, noires. Mais dans le cas d’une personne dépressive, une simple phrase peut entraîner une rechute ‘ Je ne sers à rien ‘ tourne en boucle de manière automatique. Alors qu’une personne lambda sort de la boucle, la pensée ne s’arrête pas chez un dépressif », explique Florent Dulong. Ce flux de pensée incontrôlé se nomme « pilote automatique ». Le soignant accompagne ces patients pour identifier leurs pensées grâce à la psychoéducation.
« Le réflexe est de fuir les pensées, de les contrôler et d’user de la pensée positive », précise l’infirmier. « En fait, la méditation propose de ne pas juger ni de fuir mais plutôt de s’entraîner à une neutralité bienveillante vis-à-vis de soi et envers les pensées. On muscle l’esprit. Cela permet de mieux se concentrer, dès qu’une pensée désagréable apparait, comme ‘ Je suis nul ‘ ou ‘ je ne suis pas capable ‘, on apprend à l’accueillir d’abord, puis à l’accepter. On accepte qu’on soit mal, sans jugement ». L’acceptation est une dimension importante dans le travail thérapeutique par la méditation, elle est aussi traduite par la « reconnaissance de ce qui est ». Tout l’intérêt de la pratique en groupe est de s’entourer de bienveillance. Pour ceux qui poursuivent la pratique avec régularité — au-delà de 8 semaines et au moins 45 min par jour, les études montrent qu’un tiers ne rechute pas. Les résultats seraient identiques à la prise d’antidépresseurs.
La suite de cet article est à retrouver dans un ancien numéro d’Esprit Yoga N°52.
Avec la précieuse contribution de Mona Demaeght