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Cécile Roubaud : “Mon Grand Maître aujourd’hui est la nature”

À l’occasion de la sortie de son livre Yin Yoga, rencontre avec Cécile Roubaud, pionnière de ce type de yoga en France.

Esprit Yoga : Comment avez- vous rencontré le yoga ?

Cécile roubaud : Au début des années 2000, j’étais en école de commerce et me posais beaucoup de questions sur le côté mercantile de la carrière à laquelle je me destinais. Je suis allée à un cours de Hatha-Yoga proposé par l’école et là, coup de foudre immédiat : j’ai plongé dans la pratique. Un an plus tard, j’ai découvert l’Ashtanga : nouvelle révélation. Ce que j’y trouvais comblait parfaitement mon besoin de canaliser une énergie débordante. Pendant 2 ans j’ai enchaîné les stages jusqu’à ce que l’un de mes professeurs me propose une bourse pour me former. J’ai enseigné tout de suite. Plus tard, Shiva Rea m’a fait aimer le Vinyasa, en m’apportant en quelque sorte cette délicatesse caractéristique que l’on trouve dans le flow.

CR : Je me suis rendue compte que je n’avais pas besoin d’être toujours « en force » pour qu’une transformation se passe. Lorsqu’on termine une pratique, il y a un état particulier de flottement qui reflète l’énergie se remettant à circuler. Dans le Yin, j’ai retrouvé cet état de béatitude, dans une autre tonalité. A l’issue de ma première formation, j’ai clairement eu la sensation de changer de peau. Cela a été pour moi le début du chemin vers la pleine acceptation de ma féminité.

E.Y. : Diriez-vous que le Yin a donné une autre dimension à votre pratique ?

CR : Tout à fait ! Cela a été un vrai tournant. Le Yin m’a permis de transformer ma pratique de l’Ashtanga en y amenant de la douceur, de la fluidité. J’ai découvert que je pouvais l’aborder de façon plus instinctive et naturelle aussi, en respectant mes cycles, mon énergie.

CR : De la possibilité de toujours évoluer, de l’expérience de pouvoir se reconnecter à soi à chaque instant. Mon Grand Maître aujourd’hui est la nature, je vais souvent me ressourcer dans les montagnes. J’ai d’ailleurs choisi d’y vivre car le contact des arbres et de la nature m’inspire et je puise un enseignement dans cette beauté.

CR : Je reconnais l’utilité de cette société hyperconnectée mais une part de moi y est réticente. À mon sens cela va à l’encontre de notre chemin de yogis. Il y a une certaine fascination pour la flexibilité du corps et les postures acrobatiques alors qu’il s’agit d’un aspect très réduit du yoga. Si je suis tout de même présente sur Instagram, je ne poste pas de photos de moi en performance. Je partage plutôt des poèmes : une forme d’enseignement qui parle au cœur et non à l’intellect.

CR : Effectivement je m’entoure beaucoup de femmes. Ce n’est pas un choix délibéré même s’il y a une certaine connexion de sororité. Il faut dire aussi que le yoga est un milieu très féminin ! J’aime avant tout la notion de partage et je m’entoure tout aussi volontiers d’hommes. Je m’apprête d’ailleurs à enseigner avec mon compagnon !

CR : On me demandait souvent dans les formations des conseils d’ouvrages sur le Yin, et je n’avais rien à proposer en français. L’idée est venue d’écrire mon propre livre. A partir de ce moment là, les choses se sont enchaînées de manière assez rapide et simple. Ce qui est amusant dans la genèse du livre, c’est que j’ai rencontré mon éditeur le jour où je suis tombée enceinte et que j’ai terminé les corrections 4 jours avant la naissance de mon fils !

EY : Pourquoi formez-vous des professeurs au Yin et pas à l’Ashtanga ou au Vinyasa que vous enseignez depuis de nombreuses années ?

CR : Tout d’abord parce que j’ai envie de partager cette expérience profonde que j’ai vécu lors de ma rencontre avec le Yin. J’ai longtemps assisté Biff Mithoefer (célèbre professeur de Yin Yoga, NDLR) dans ses formations, jusqu’au jour où il m’a demandé de former d’autres professeurs à mon tour. Or, j’ai besoin de l’autorisation des mes professeurs afin de légitimer cette transmission ! Shiva Rea m’a dans ce sens encouragé à former en Vinyasa mais je ne l’ai pas encore mis en action car le moment n’est pas venu.

EY : Shiva Rea a dit un jour que la maternité avait transformé sa pratique. La naissance de votre petit garçon il y a quelque mois a t-elle changé la vôtre ?

CR : Indéniablement cela a profondément changé ma pratique du yoga, pas sur mon tapis, mais dans tous les aspects de ma vie. L’enfant devient cet être au service duquel on se place et face à qui rien n’est négociable ! Chaque jour l’ego est malmené. Cela amène à expérimenter que le yoga se pratique avant tout dans la relation aux autres, au sein de la famille, et dans la rencontre des limites de son mental au quotidien, et de l’attachement aux choses.

Cet article est à retrouver dans le magazine n°44 d’Esprit Yoga.

Avec la précieuse contribution de Nadia Stragliati

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